PEPR Villes Durables et les Bâtiments Innovants : interview croisée de l'Université Gustave Eiffel et du CNRS
Quels sont aujourd'hui les grands enjeux autour de la question des villes durables et des bâtiments innovants ?
Sans doute le premier enjeu est d’abord de mettre en œuvre des villes durables et des bâtiments innovants. Les expériences conduites depuis la fin des années 1990 ne semblent pas dépasser le stade de prototypes voire de démonstrateurs plus ou moins étendus. Pour dépasser ces difficultés il semble nécessaire de conduire les recherches autrement soit deux enjeux majeurs du PEPR :
- favoriser les recherches « en urgence » ou encore « tirées par l’aval »
- pour ce faire, assurer une meilleure fluidité entre les sciences, entre les techniques, entre les métiers, soit, assurer l’exercice de pluralité scientifique et technique.
Pour accélérer la mise en œuvre de villes durables il devient urgent de favoriser des recherches tirées par l’aval, c’est-à-dire partant des difficultés concrètes que rencontrent les parties prenantes (notamment les collectivités et les industriels du secteur). Ces difficultés peuvent donner lieu à la mise en place de nouvelles recherches qu’elles soient appliquées et/ ou fondamentales, qu’il soit nécessaire de s’inscrire dans un temps très court avec une recherche action ou dans des temps plus longs.
Ces verrous et toutes les difficultés à opérer des villes et bâtiments durables tiennent également aux modes de production des connaissances et des savoirs. Les sciences comme les métiers sont organisées en silos très étanches. Aussi la recherche comme l’action devrait s’appuyer sur une pluralité scientifique et technique : mobiliser toutes les sciences et techniques nécessaires.
Mais l’exercice de la pluralité scientifique et technique induit une parité des disciplines et des métiers pour assurer les circulations des données et des connaissances entre les disciplines et les métiers de manière à accélérer l’innovation pour lever les verrous actuels qui bloquent la mise en œuvre de ville durable et de bâtiments innovants.
Quels sont les objectifs du PEPR VDBI ?
Comme pour tous les PEPR, le premier objectif de VDBI est de contribuer à la structuration scientifique nationale sur le sujet VDBI. Bien évidemment de nombreux laboratoires et chercheurs ont déjà contribué, à travers des projets de recherche ou des thèses, à la production de connaissances sur cette thématique très large. Le constat peut toutefois être fait également que certains travaux sont faits en parallèle, sans réels liens entre eux, et que ces travaux ne sont pas toujours portés à connaissance des acteurs publics, ou du grand public.
Or, pour répondre à l’exigence d’une recherche tirée par l’aval, comme évoqué précédemment, ces recherches doivent être diffusées et connues du plus grand nombre, si nous souhaitons aller plus loin et que des « solutions » soient expérimentées et mises en œuvre sur les territoires. Le premier effort visera donc à rassembler les forces vives et leurs travaux pour les valoriser, mais aussi pour ensemble faire émerger des verrous scientifiques et tenter d’y répondre.
Ce sera notamment l’objectif des Appels à projets et des trois centres opérationnels, qui sont opérationnels en ce sens qu’ils consistent à valoriser immédiatement les connaissances acquises et stabilisées en les mettant à disposition des communautés scientifiques et techniques ainsi que des parties prenantes.
Le deuxième grand objectif est que ces travaux impliquent dès le départ, l’ensemble des parties prenantes de la VDBI. Comment vouloir que des solutions pertinentes soient mises en œuvre si les collectivités ou certains acteurs socio-économiques ne sont pas mis dans la boucle ? Les impliquer dès le départ peut également permettre d’identifier des verrous liés à la mise en œuvre, en termes de connaissances ou d’organisation…
En résumé, le PEPR VDBI vise à structurer les communautés scientifiques et techniques ainsi que les communautés d’experts des parties prenantes afin de rendre possible la ou les réponses aux questionnements posés par la VDBI.
Quels sont les acteur.trices de ce programme ?
Les acteurs concernés, sont donc tous les acteurs impliqués dans la production de connaissance académique (monde de la recherche), de connaissances terrain (experts dans les territoires) et dans la mise en œuvre des VDBI (collectivités locales, entreprises, mais aussi les citoyens et les associations). Les projets qui seront financés dans le cadre des Appels à projets du PEPR, seront portés par des laboratoires de recherche.
Afin de favoriser la pluridisciplinarité et pour constituer une communauté nationale, et il sera ainsi attendu que chaque projet implique plusieurs laboratoires d’universités ou centres de recherche différents. De la même manière chaque projet devra impliquer une collectivité locale et/ou un acteur socio-économique impliqué sur un territoire.
Le dispositif d’animation du PEPR visera en continu à favoriser les liens entre les différentes communautés, les différents projets et à valoriser les résultats produits, notamment lors des conférences annuelles du PEPR ou lors d’évènements organisés dans la même stratégie Nationale d’Accélération Solutions pour les villes durables et bâtiments innovants.
Quelles pourraient être les applications concrètes des recherches issues du PEPR ?
Les véritables applications concrètes sont précisément de l’ordre de la capacité à mettre en œuvre des villes et bâtiments durables. En théorie ces capacités existent, mais les difficultés tiennent aux verrous de mises en œuvre qui limitent ces capacités. Le PEPR a recensé 5 grands défis de mise en œuvre de villes durables et de bâtiments innovants. Ces défis ne peuvent pas vraiment être pris séparément, ils sont interdépendants.
Ainsi, les réponses concrètes doivent être apportées aux effets multidimensionnels du changement climatique ; à la production de villes résilientes ; aux modalités de fabrication ou d’adaptation des villes existantes et de leur extension à la sobriété et à la frugalité ; à l’opérationnalité de villes inclusives et équitables en partant des potentialités existantes, notamment la gestion des espaces publics urbains ; à poser la ville durable dans ses contribution à la santé globale, c’est-à-dire non limitée à la seule santé humaines, mais capable de poser que cette dernier dépend tout d’abord de l’environnement que produit l’activité de l’ensemble planétaire, y compris l’activité humaine urbaine.
Enfin les applications concrètes peuvent venir de travaux et de recherches marginaux ou émergents que le PEPR devra s’appliquer à accompagner.